La Fenêtre de Diane (extrait)

 

Couverture de la Fenêtre de Diane

http://www.moutons-electriques.fr/livre-351

« Le Très-Haut n’écoute plus. Les yeux clos, il se masse le front et les tempes du bout des doigts. « Étrange, dit-il. J’ai cru… on aurait dit un souffle glacé à l’intérieur de mon crâne.
— Moi aussi ! s’écrie le surveillant. Mais c’est…
— Le marque-page, dit le lecteur. Il est revenu.
— Pas LE marque-page, DES marques-pages, corrige le surveillant. Chacun le sien. Je vais pouvoir retourner à la Bibliothèque.
— Et moi retrouver la Sapience.
— Moi… » Le Dragien s’est retourné. Il considère le fauteuil de malade avec perplexité. « La petite fille… Je ne peux quand même pas l’abandonner ici, dans ce lieu inconnu !
— Vous voulez la ramener à l’auberge ? À l’instant T-10 ou T-5, enfin quelques minutes avant l’anéantissement de ce monde ? Ici, dans cet endroit en marge du temps, elle se trouve à l’abri…
— À l’abri des nuées ? Elle en sera encore plus à l’abri si je l’emmène loin de l’instant où elles apparaissent… »

La Fenêtre de Diane de Dominique Douay, où quand la force d’évocation d’un Modiano rencontre l’esprit génial d’un Philip K. Dick.

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« Dix-huit heures vingt-sept. Elle enfourne le Français dans un taxi et disparaît derrière un groupe de hauts fonctionnaires des ministères proches tandis qu’il indique sa destination à un chauffeur plus intéressé par cette fille aux allures distantes que par son passager. Quoique rapide, sa démarche doit sembler étrangement empruntée à un improbable observateur. Combien de milliers de spermatozoïdes une seule éjaculation libère-t-elle ? Dix mille, cent mille, beaucoup plus peut-être, et il suffit d’un seul pour… Normalement, les statistiques sont en sa faveur, mais elle continue de marcher, les cuisses serrées, le ventre contracté. Un seul, mais pourquoi pas celui-là, justement, qui aurait la mauvaise idée de vouloir s’évader ? Dans ce cas, c’est sûr, tout serait à recommencer. Ça, il n’en est pas question.
Quand même plusieurs semaines à attendre avant le prélèvement. Le temps de faire des milliers de fausses couches. Il y a des jours comme ça où elle aimerait bien être un peu plus vieille.
Elle lisse une mèche dont les pointes peinent à atteindre le menton, examine son reflet dans une vitrine. Se laisser pousser les cheveux… après tout, c’est peut-être pas une si mauvaise idée. »